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Le monument aux morts de Bastelica 

Le monument aux morts de Bastelica, dont les plans ont été dessinés par l’architecte corse Toussaint Contestri et la sculpture a été réalisée par Anna Bass, est inauguré le16 septembre 1923. C’est l’aboutissement d’un processus engagé dès la fin de la Grande Guerre.

En septembre 1919, le journal « Le Petit Bastelicais » publie l’appel lancé par le comité pour l’érection d’un monument aux enfants de Bastelica morts pour la France :

« La Corse reconnaissante élèvera à ses enfants morts pour la Patrie un monument digne d’Eux et digne d’Elle. Ce monument qui se dressera bientôt sur une des places publiques du Chef-lieu. [ … ]

« Cette œuvre, nous en sommes persuadés réalisera l'accord de tous les Bastelicais. Elle dépasse trop nos personnalités éphémères, elle domine trop nos petites animosités locales pour que nous ayons à craindre des oppositions ou des abstentions. » « Quel sera le monument ? Sur quel emplacement l’édifiera-t-on ? Ces questions se poseront demain. Mais quelles que soient sa forme et ses propositions, — colonne, mausolée, — quels que soient les matériaux employés, — granit, marbre ou bronze — nous pouvons affirmer dès aujourd’hui que tous les noms des enfants de Bastelica, victimes de la guerre, y seront gravés en caractères ineffaçables […] Le monument sera ce que nous voudrons qu’il soit. C’est à tous les Bastelicais, à ceux qui n’ont jamais quitté leur village autant qu’à ceux de France, d’Algérie et d’ailleurs, de dire s’ils veulent une œuvre qui soit digne des morts et des vivants.

« Nous célébrons tous les jours dans notre Eglise resplendissante de cierges et décorée aux couleurs nationales, des services funèbres à la Mémoire de nos Grands Morts. Toute la population, par sa présence et par son attitude, s’associe au deuil des familles éprouvées. Hommage d’un jour, — Hommage solennel, mérité. Mais cette glorification d’un jour, après laquelle nous semblerions avoir le droit de ne plus penser à eux, ne suffit pas. Il faut leur rendre un hommage qui soit éternel pour autant que sont éternelles les choses humaines. Il leur faut, en un mot, le monument qui aura une valeur d’exemple pour les  enfants qui naîtront demain.

« Pour matérialiser notre pensée, — la pensée de tous, — il faut de l’argent. Et nous ne devons compter que sur nous-mêmes, parce que l’œuvre dont nous poursuivons la réalisation est une œuvre purement locale, simplement bastélicaise. C’est à nous, et à nous seuls, qu’il appartient, après la bataille, de ramasser nos morts, de les ensevelir de leur rendre les honneurs suprêmes. » « Bastelicais ! Vous tous qui aimez votre village, vous tous qui avez eu la joie de revoir les vôtres et vous tous, hélas ! qui avez eu des êtres chers tombés au Champ d’Honneur, disparus dans la, tourmente, morts lamentablement sur un lit d’hôpital ou plus lamentablement encore dans une geôle d’Allemagne vous comprenez notre pensée… [ … ] « Nous rêvons l’accomplissement d’une belle œuvré de reconnaissance durable et de fervente pitié. »

« Vous nous donnerez les moyens de l’exécuter. » LE COMITÉ.

Le maire de Bastelica, Jean-Augustin Seta, verra le projet aboutir rapidement avec une inauguration du monument aux morts le16 septembre 1923. C’est l’artiste Anna Bass qui en a réalisé l’imposante statue ; cette sculpture dénommée « Patria » est considérée comme son œuvre la plus importante. Elle est présentée en 1922 au Salon de la Société Nationale des Beaux-arts (n° 1264) avec sa destination « pour le monument aux morts de Bastelica en Corse » et reproduite dans l’annexe du catalogue officiel. Anna Bass est née à Strasbourg en 1876 et décédée à Paris, en 1961. elle expose au Salon des Artistes français entre 1911 et 1913, au Salon d’Automne entre 1911 et 1935, au Salon de la société Nationale des Beaux-arts, dont elle est associée, de 1921 à 1933. Plusieurs musées en France conservent de ses œuvres : le musée National d’Art Moderne de Paris -Centre Georges Pompidou- : Danseuse (1961) et un Torse de femme ainsi que les musées de Metz et Strasbourg.

La sculpture est en bronze de fonte à cire perdue exécutée par la fonderie Valsuani. Le monument est composé d’un arc de granit sous lequel la statue est placée. Cette œuvre est une illustration de la représentation généralement admise pour la femme, mère et déesse à la fois, avec les attributs de la Victoire : une couronne dans chaque main, et un aspect esthétique séduisant : formes à peine cachées par un drapé quasiment transparent tout en restant « acceptable » à une époque où il est difficile de présenter en même temps l’idéal féminin et les valeurs humaines traditionnelles. L’inscription « PATRIA » 1914-1918 est porté sur la partie supérieure du piédestal, précédant les plaques où figurent les noms des enfants du village morts pour la France.

Pierre Claude GIANSILY

Historien de l'Art

Petit Bastiais

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Anna Bass, Victoire, 1922, bronze, monument aux morts, Bastelica (Corse-du-Sud) © Claude Giansily

Plaques nommant les enfants de Bastelica morts pour la France

Anna Bass, Victoire, 1922, bronze, détail © Claude Giansily

Crédits photographiques, © Claude Giansily

Bibliographie :

- Le petit Bastelicais, septembre 1919

- Journal de la Corse, 23 septembre 1923

- Giansily, Pierre Claude, « Approche de la sculpture en Corse aux XIXe et XXe siècles », Etudes corses, n° 61, décembre 2005

- Pellegrinetti, Jean-Paul et Ravis-Giordani, Georges, Du deuil à la mémoire Les monuments aux morts de la Corse (Guerre 1914-1918), édition Albiana, 2011.

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